Mâconnais : à la découverte des cépages qui façonnent l’âme du vignoble

Avant de plonger dans la diversité des cépages, il est précieux de comprendre ce qui caractérise le Mâconnais. Située entre Tournus au nord et Saint-Véran au sud, la région s’étend sur une trentaine de kilomètres, baignée d’un climat semi-continental à tendances méditerranéennes. Les sols, principalement calcaires, marneux ou argilo-calcaires, expliquent la singularité de ses vins.

• Environ 6 800 hectares consacrés à la vigne (BIVB, 2023).
• Près de 20 millions de bouteilles produites chaque année, dont plus de 85% de vins blancs.
• Un vignoble qui compte près de 1 000 vignerons (source : BIVB).
• Des AOC réputées : Mâcon, Mâcon-Villages, Pouilly-Fuissé, Saint-Véran, Viré-Clessé, Pouilly-Loché, Pouilly-Vinzelles, etc.

Tout ce contexte fait du choix des cépages un enjeu, entre fidélité historique, adaptation au climat et recherche d’excellence.

Un cépage universel… mais unique ici

Si le Mâconnais est une mosaïque de villages, il est aussi une terre où le chardonnay règne en maître. Sur plus de 80% du vignoble, ce cépage donne naissance à des vins blancs amplifiés par les variations de reliefs et de sols.

Quelques faits marquants :

• La Bourgogne est le berceau originel du chardonnay ; le nom viendrait du village de Chardonnay, à l’est de Lugny.
• Dans le Mâconnais, on recense environ 5 500 hectares de chardonnay plantés – soit près de 22% de la surface mondiale du cépage (BIVB, OIV 2021).
• Les grands crus, comme Pouilly-Fuissé, ne s’autorisent pour leurs vins que le chardonnay.

Profil des vins issus du chardonnay mâconnais

Le chardonnay exprime ici ses plus beaux atours de fraîcheur et de rondeur :

• Couleur : jaune pâle à doré.
• Nez : fleurs blanches (aubépine, acacia), fruits à chair blanche (poire, pêche), agrumes, nuances parfois beurrées ou toastées selon l’élevage en fût.
• Bouche : délicate, aromatique, marquée par la minéralité, la tension, parfois une ampleur gourmande, surtout sur les climats argilo-calcaires.

L’unicité du chardonnay mâconnais réside dans sa capacité à exprimer le cru et le climat, tout en proposant une palette accessible et séduisante pour l’amateur, mais aussi sophistiquée dans les meilleurs terroirs.

Parmi les cépages rouges bourguignons, le gamay noir à jus blanc est l’identité historique du sud de la région. S’il occupe seulement environ 20% de l’encépagement du Mâconnais (BIVB), il incarne toute l’énergie des rouges frais et fruités de l’appellation.

Un cépage d’origine contestée, parfaitement acclimaté

• Le gamay serait né dans le village du même nom, près de Saint-Aubin (Côte-d’Or), puis aurait migré vers le sud dès le 14e siècle après avoir été « banni » des côtes de Beaune, accusé d’être trop productif (source : La Vigne).
• Dans le Mâconnais, il se concentre toutefois sur les sols granitiques et sablonneux où il exprime finesse et générosité aromatique.

Ses caractéristiques :

• Couleur : rouge rubis vif, reflets pourpres.
• Nez : petit fruit rouge (cerise, framboise, groseille), parfois notes épicées ou florales.
• Bouche : peu tannique, léger, jolie trame fruitée, parfaite sur la fraîcheur et la buvabilité.

Le gamay en Mâconnais donne des vins rouges souples, faciles d’accès, à boire jeunes, mais certains crus révèlent une structure étonnante (ex. : Mâcon-Serrières, Mâcon-Saint-Gengoux-le-National).

Loin derrière le chardonnay en termes de surface, le aligoté n’en reste pas moins présent sur quelques parcelles du Mâconnais, même s’il reste confiné à la Bourgogne aligoté AOC plus qu’aux appellations communales.

Portrait d’un “second rôle”

• Le cépage représente à peine 2% du vignoble du Mâconnais (source : BIVB).
• Il offre une alternative tout en vivacité aux blancs traditionnels, parfait en apéritif – notamment dans le célèbre « kir ».
• Très résistant aux maladies, il était autrefois très utilisé en polyculture.

Ses arômes : fleurs blanches, citron, pomme verte, notes légèrement herbacées. Sa vivacité lui confère un intérêt récurrent en période estivale ou dans un registre plus gastronomique, sur les fruits de mer.

Il règne sur toute la Côte d’Or et la Côte Chalonnaise, pourtant, le pinot noir n’occupe qu’à peine 1% du vignoble mâconnais. On le retrouve parfois en assemblage, rarement en monocépage.

Pourquoi si peu de pinot noir dans le Mâconnais ?

• Le pinot noir supporte moins les chaleurs et l’ensoleillement méridional ; les meilleurs résultats se rencontrent sur les terroirs plus au nord ou d’altitude.
• Le choix historique des vignerons et la typicité recherchée dans le Mâconnais favorisent le gamay pour le rouge.
• Certains Mâcon et Mâcon-Villages rouges peuvent contenir jusqu’à 30% de pinot noir, mais cela reste l’exception.

Si l’histoire du vignoble est dominée par le chardonnay et le gamay, d’autres cépages apparaissent dans le paysage mâconnais, parfois en anciens ceps rescapés, parfois à l’initiative de vignerons curieux ou dans le cadre de recherches sur la biodiversité ampélographique.

Cépages rares ou quasi introuvables

• Melon : présent en Bourgogne depuis des siècles, il a quasiment disparu mais subsiste sur quelques rangs. Il a donné son nom au Muscadet ligérien, mais conserve ici un patrimoine génétique intéressant.
• Sacy : un ancien cépage blanc autorisé mais très rare.
• César : parfois cultivé à titre de conservation dans les conservatoires viticoles de Saône-et-Loire.

Ce regain d’intérêt pour les variétés oubliées traduit une volonté de préserver la palette génétique, mais aussi d’anticiper les défis du changement climatique.

Des expérimentations face au climat

• Depuis les années 2010, l’INRAE et la BIVB expérimentent l’adaptation de nouveaux cépages, français ou étrangers, pour renforcer la résilience de la vigne au réchauffement (ex. : floreal, voltis).
• Objectif : garantir des vendanges qualitatives avec moins de traitements, et maintenir les équilibres aromatiques traditionnels.

La diversité des sols (calcaires du jurassique, marnes, argiles, granits du Beaujolais) permet aux vignerons du Mâconnais de jouer sur milles nuances d’expression pour leurs cépages.

• Le sud : sols plus riches, argileux, donnent des chardonnays amples et solaires (Pouilly-Fuissé, Saint-Véran).
• Le centre : terroirs frais, calcaires, idéals pour la tension minérale des Mâcon-Villages.
• Le nord : poches de granit et schiste, propices au gamay, sur les crus comme Mâcon-Mancey.

C’est cette variété, ajoutée à la mosaïque climatique et à la main du vigneron, qui offre une large palette aromatique à chaque cépage emblématique du Mâconnais.

Découvrir les cépages du Mâconnais, c’est s’ouvrir à une histoire humaine et paysagère, où chaque choix d’encépagement raconte l’adaptation, le respect de la tradition et l’innovation face aux enjeux d’aujourd’hui. Le chardonnay y trouve un écrin d’exception, le gamay une expression élégante, tandis que les cépages secondaires et anciens sont autant de pistes pour l’avenir de ce vignoble vivant. La curiosité, la diversité et la passion de ses vignerons font ainsi rayonner le Mâconnais sur la scène viticole bourguignonne, et bien au-delà.

• BIVB : Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne — www.vins-bourgogne.fr
• OIV : Organisation Internationale de la Vigne et du Vin
• INRAE : Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement
• La Vigne, revue spécialisée

Une promenade au cœur du Mâconnais réserve bien des surprises : chaque saison, chaque village, chaque verre racontent une facette nouvelle d’un vignoble profondément vivant – et toujours à explorer !